Nul doute n'est permis : le printemps est bien là.
Et il est temps d'aller admirer les merveilles sous-marines, à l'abri de la Tramontane au sud du Cap Béar. Un rapide trajet nous mène de Port Argelès à l'Anse Sainte Catherine ; ici, la mer est aussi calme que l'étang de Leucate et j'en profite pour capeler mon bloc tranquillement dans l'eau, bientôt rejoint par les autres dauphins catalans qui préfèrent la bascule arrière.
Allez, on y va ! Heu, on n'y voit pas bien, là, quelqu'un a remué la vase avant notre arrivée ? Heureusement, sous le bateau, sur le coralligène à 20m de fond, la visibilité s'améliore. Nous y croisons quelques petites rascasses peu farouches.
Je m'inquiète un peu pour mon binôme Patrick qui plonge en combinaison d'été, sans gant ; il s'est rapidement recroquevillé sur lui-même, et lorsque je le regarde, j'en ai froid moi-même ! Geneviève qui nous accompagne aussi est ici dans son élément.
La faune semble avoir déserté l'endroit, pour laisser la place aux plongeurs ; tout autour j'entends des bulles, j'entrevois des silhouettes fantomatiques palmées...
Nous nous promenons sereinement dans des failles, où se cachent des petites langoustes au milieu des petites anémones jaunes.
Qu'est-ce qui peut effrayer tant les êtres sous-marins aujourd'hui ? Un petit triptérygion me laisse à peine le temps de le photographier.
Un petit poulpe monte la garde devant son antre.
Je porte mon attention sur les nombreuses dentelles de Neptune.
Avez-vous remarqué la petite larve en haut à gauche de la dentelle ?
Et sur celle-là, voyez-vous l'intrus ?
Mais si, là, il y a un tout petit crabe :
Je remarque aussi un minuscule nudibranche, une doris à papilles rouges.
Je le trouve si joli que je vous en offre un autre cliché.
Le temps d'un cliché, il a déjà avancé de quelques millimètres !
Après vingt minutes de plongée, je m'arrange pour repasser devant le mouillage pour demander à Patrick s'il veut continuer (j'ai l'impression qu'il claque des dents). Ben il veut continuer, alors je repars pour une boucle.
Geneviève me fait signe : elle a déniché une petite murène timide.
Dès le premier coup de flash, la murène disparaît au fond de son trou. La faune est vraiment timorée aujourd'hui, c'est étrange...
Nous croisons encore plusieurs palanquées. Je reconnais Didier, qui me fait signe de le suivre, et me montre une forme imprécise posée sur le sable.
Elle est là, qui m'attendait. Une créature monstrueuse remontée des abysses (je sais, on dit « benthique », mais le terme paraît moins dramatique).
Son œil malin ne perd aucun détail de la scène ; elle semble prendre son temps pour mieux choisir sa proie.
Inutile d'espérer fuir, la bête se sait invincible et elle me sourit de toutes ses dents acérées.
Je suis hypnotisé par son regard, je ne peux plus bouger, le drame est imminent et inéluctable.
Mais Didier vient furtivement la chatouiller sous les nageoires, et le charme maléfique est rompu.
Nous repartons alors vers le mouillage, laissant le monstre du cap dans l'attente d'une nouvelle proie.
Nous remontons en pleine eau, pas très loin du mouillage finalement puisque une fois aux paliers, j'aperçois la coque du bateau ; nous nageons alors vers le cordage du mouillage pour buller plus tranquillement.
Depuis cette sortie, chaque nuit, le monstre du cap revient hanter mes rêves de plongée... Le printemps sous-marin offre décidément d'étrange surprises.